Sur le champ

Sur le Champ est un dialogue sur la recherche du bonheur. Deux personnages, mi philosophes, mi clowns de théâtre, questionnent le cœur de l’existence. Entre burlesque et sagesse, ils évoquent des sujets essentiels et nous révèlent comment nous frayer un chemin juste et personnel à travers l’agitation du monde.

Sur le champ, c’est aussi une adaptation contemporaine de la Bhagavad-Gîtâ, fruit d’un confinement en Inde, au printemps 2020. C’est pourquoi l’échange philosophique de Sur le champ propose aussi d’appréhender l’esprit originel du yoga, sans folklore, mais avec humour, dans l’esprit de ce qu’écrivait le poète sanskritiste René Daumal : « ce que je voulais apprendre, c’était la pure technique de soi : d’abord le contrôle, ensuite la transformation ; c’est-à-dire le yoga ». Une quête spirituelle. À l’heure où il y a urgence à ce que le monde se réinvente, cette remise en question de la destinée et de l’humanité semble, plus que jamais, nécessaire.

Distribution

Jeu Didier Galas et Jean-Paul Sermadiras
Texte Didier Galas
Regard scénographique Jean-François Guillon

Lumières Jean-Luc Chanonat
Costumes Cidalia Da Costa

Co-production Compagnie du PasSage et Les Hauts Parleurs

Une rencontre impromptue pour un confinement inattendu

Mars 2020. Deux tournées théâtrales distinctes ont amené Jean-Paul Sermadiras et Didier Galas en Inde. C’est là qu’ils se retrouvent confinés, au cœur du Tamil Nadu, à Auroville, cité internationale fondée en 1968 sur les principes philosophiques de Sri Aurobindo. Dans ce monde perturbé, esclave d’une économie mondialisée, désorientée et essoufflée, pour la première fois depuis longtemps, comme nombre de gens autour de la planète, ils ont la sensation « d’avoir » du temps. Dès le premier jour de confinement, ils lisent le Misanthrope de Molière et enchaînent sur des textes de Sri Aurobindo, dont une traduction de la Bhagavad-Gîtâ.

Aujourd’hui, ce texte apparaît comme une réponse pragmatique aux crises successives que l’équilibre du monde traverse. Changer le monde devrait probablement commencer par se changer soi-même, travailler sur soi afin d’envisager au mieux la construction d’un monde d’après.
Une sagesse que l’on retrouve chez le grand poète persan Djalâl Al-Dîn Rûmi : « Hier j’étais intelligent je voulais changer le monde. Aujourd’hui je suis sage je veux me changer moi-même. » ; ou encore chez le philosophe stoïcien Épictète : « C’est la marque d’un petit esprit de s’en prendre à autrui lorsqu’il échoue dans ce qu’il a entrepris ; celui qui exerce sur soi un travail spirituel s’en prendra à soi-même ; celui qui achèvera ce travail ne s’en prendra ni à soi ni aux autres. »

Une tournée à pied

Le propos de ce texte essentiel est de trouver la meilleure version de soi-même afin de devenir ce que l’on est profondément. Inspirée par cette ambition, la démarche globale du projet, tant dans son économie que dans sa réalisation, fait preuve de dénuement et de simplicité.
Notre volonté est de porter cette parole au plus près du public, c’est pourquoi nous proposons une itinérance pédestre : les deux acteurs marchent de village en village (entre 10 et 20 kilomètres par jour) et s’arrêtent pour une étape qui allie rencontre, repas, repos, gîte et spectacle.
Que cela soit sur un plateau vide, sur un sentier de montagne ou sur la terre d’un champ en jachère, on retrouve nos clowns métaphysiques, l’un tendance clown blanc, et l’autre plutôt auguste. Où que ce soit, ces deux personnages s’interrogent, entre grotesque et réalité, sur la possibilité du bonheur et la capacité d’action de chacun aujourd’hui. Et le plus joyeux, c’est qu’ils trouvent des solutions qui s’adressent à tous.
Se déplaçant par un moyen de locomotion ancestral et naturel : la marche, les deux acteurs affirment, dès qu’ils arrivent dans un lieu, que leur acte premier est l’engagement du corps dans l’exercice. Par sa relation à l’effort et au déplacement, la marche est le symbole d’une action simple qui permet de dépasser les limites du confortable. Notre ambition est de nous transformer par l’action physique et artistique, et en accord avec l’environnement. Nous sommes prêts à emprunter « les chemins les moins fréquentés » avec une simple lueur d’espoir pour nous guider. Cette « tournée à pieds » est l’objet d’une expérience physique pleinement vécue et transmise aux spectateurs chaque soir.

Une adaptation contemporaine de la Bhagavad-Gîtâ

En sanskrit, Bhagavad-Gîtâ signifie littéralement le « Chant du Bienheureux ». Il s’agit de la partie centrale du poème épique le Mahabharata. Composé de 18 chapitres, la Bhagavad-Gita n’a cessé, depuis le Vème siècle avant J.C, d’imprégner la pensée indienne.
Ce texte raconte comment Krishna (avatar du dieu Vishnou) enseigne le yoga à Arjuna (prince guerrier Pandava). Ce dernier étant en proie à un doute profond avant d’entamer la bataille mortelle qui va l’opposer à ses cousins, les Kaurava.
« Il peut être utile, lorsqu’on aborde la Gîtâ, d’indiquer avec précision dans quel esprit on l’approche et ce que l’on pense pouvoir en retirer qui ait de la valeur pour l’humanité présente… rechercher dans la Gîtâ ce qu’elle contient de vérités vraiment vivantes, en dehors de leur forme métaphysique… extraire de ce livre ce qui peut nous aider, nous ou le monde en général, et le traduire dans la forme et l’expression les plus naturelles et les plus vivantes, qui soient adaptées à l’état d’esprit de l’humanité moderne et appropriées à ses besoins spirituels. »
(Sri Aurobindo, Essais sur la Gîtâ – 1916)

Le regard de Colette Poggi

Dans un lieu sans nom, hors du temps, nous voici transportés au cœur d’un dialogue aux questionnements universels. Cet échange profondément humain nous pique au vif, car il pointe vers nos propres angoisses, souvent inexprimées, sur le sens de l’existence, sur le bien-fondé de l’agir ou du non-agir. Qui n’a jamais affronté ce dilemme, jadis mis en scène dans la Bhagavad Gîtâ ? Ce poème philosophique indien est depuis vingt-quatre siècles considéré comme un joyau dans l’écrin du Mahâ-Bhârata, vaste épopée à l’image de l’Odyssée d’Homère.

La mise en scène de Didier Galas et Jean-Paul Sermadiras réussit un tour de magie : d’une extraordinaire sobriété, elle nous emporte, entre émotion et sourire, dans un dialogue déconcertant qui vient nous éclairer sur notre quotidien comme sur notre monde contemporain si imprévisible.

Rien de pesant ni de dogmatique, mais une incitation pleine de sagesse à voir et à agir autrement en accordant nos actes, nos paroles et nos pensées le plus justement possible à la vie, aux autres, à l’harmonie universelle. Déployer nos antennes, ouvrir notre champ de vision, voilà le secret !

L’argument est simple : un homme en plein désarroi décide de renoncer à toute action, plus rien ne vaut la peine ! Son esprit et son corps en proie au doute et à la confusion se paralysent. C’est alors que s’engage avec son ami, une sorte de Jiminy Criquet humain, un dialogue alternant véhémence et humour. Quelques incroyables postures yoguiques ponctuent la métamorphose du désespéré, le corps cherche à comprendre lui aussi, il montre la voie : tête en bas, le regard inversé, ou tortue aux membres rétractés : il ne se laisse plus ensorceler par les illusions ni les conventions, mais relève le pari : sitôt qu’il choisit de vivre et d’agir, une nouvelle sève le fait courir et danser. Ce qu’il pensait impossible, il le réalisera pour le bien de tous. Les voix et les gestes de ces deux acteurs prodigieux déploient soudain à nos yeux un autre horizon.
L’intuition de la Bhagavad Gîtâ continue de porter ses fruits, comme elle le fit pour ces êtres hors du commun tels Gandhi, Martin Luther King, Nelson Mandela ou encore la militante écologiste Vandana Shiva. Mais ne sommes-nous pas tous concernés aujourd’hui aussi, pour habiter la planète, apaiser nos relations, bien conduire notre vie, prendre soin d’autrui, réaliser notre vocation profonde, agir et s’accomplir car « ce que j’accomplis, m’accomplit » (Vimala Thakar).

Des résidences ont eu lieu dans les bureaux de la Colline en décembre 2021 (avec le regard de Colette Poggi), ainsi qu’à Dacca (Bangladesh) en hiver 2022, avec des sorties de résidence.

Photos de la Résidence à la Colline :